Alexandre Deschaumes dépeint les paysages du monde avec une vision onirique et artistique. Photographe de la génération numérique, il a appris la technique photographique de manière autodidacte, avant de devenir photographe professionnel, formateur photo et musicien. Entretien avec un artiste épanoui…
Hum ! Il y a une sensation indicible… que j’aime dans la nature, disons, la vraie nature, celle sauvage, loin du reste. J’ai eu, il me semble, pas mal de soucis avec les rapports humains. Et mon tempérament a tendance à me pousser vers cette sorte d’isolement parfois ; même si c’est une attirance mêlée d’angoisses abstraites… C’est dans ces endroits que l’on se retrouve face à la sensation la plus vraie de son être. On peut davantage plonger dans son monde intérieur et ainsi, éventuellement, créer.
Étant totalement autodidacte depuis 2003 environ, ma réponse risque d’être un peu personnelle !
Il me semble que c’est la passion que l’on va mettre dans l’activité, sans forcément réfléchir à un résultat ou un but quelconque, qui peut faire la différence. Ceci inclut donc un temps et une énergie colossale qui ne sont pas censés être programmés ou calculés. Peut-être un peu comme une voix intérieure qui demande à être entendue… Il « suffit » alors de la suivre.
Seul, ce n’est pas toujours évident et on se heurte fatalement à des soucis techniques à de nombreuses reprises… C’est pour ça qu’à travers mes stages photo, je tente d’aider les gens à prendre les bonnes directions. J’essaie de leur apprendre ce que j’aurais aimé qu’on m’apprenne, c'est-à-dire une vision non conventionnelle avec des astuces qui peuvent faire gagner beaucoup de temps. Ces stages se déroulent dans la nature et je partage toutes mes techniques de photographie, ma façon d’observer et aussi la phase de traitement de l’image… C’est assez intense en général ! Mais ça peut ouvrir des portes.
Je viens d’arrêter mon autre travail, qui me gaspillait beaucoup d’énergie pour pas grand-chose… Et je me lance maintenant dans le néant abstrait. Je suis photographe et musicien (compositeur et professeur).
Ce qui reste, pour moi, l’essentiel, au-delà de la technique et de toute chose, c’est l’atmosphère.
Ce qui reste, pour moi, l’essentiel, au-delà de la technique et de toute chose, c’est l’atmosphère.
J’ai, pour des raisons semi-obscures, cultivé une attirance particulière pour les ambiances sombres, mélancoliques, dramatiques ou romantiques.
Aujourd’hui pour tenter d’exprimer ces ressentis à travers la photographie de nature, il y a un certain nombre de composantes importantes :
Ce que j’aime avec Anderson, ou d’autres photographes comme Marc Adamus ou Art Wolfe, c’est qu’ils vont au-delà de la photographie habituelle qui consiste à « prendre en photo un endroit ». C’est une recherche de lumière et d’ambiances où chaque élément joue en faveur d’une composition élégante, majestueuse.
Ça m’a beaucoup aidé d’observer et d’analyser leur travail sur des forums de photo : quel filtre a-t-il utilisé, quel est ce lieu incroyable, et surtout des questions comme « pourquoi cette photo est-elle si géniale ? ». La précision générale, les compositions élaborées et la grande dynamique de contrastes m’ont influencé.
Je jongle souvent entre les réglages de la valeur ISO, ouverture et filtres assombrissant pour que je puisse avoir le temps de pose qui me plait.
Certaines scènes se prêtent bien à un temps de pose très long, et d’autres, beaucoup plus subtiles. D’une façon générale, plus l’eau a un mouvement rapide, moins on a besoin d’une pose trop longue. Avec l’habitude maintenant si je vois la scène, je peux savoir ce que je veux comme temps de pose, mais en même temps j’adore toujours expérimenter !
Je me revois sur les plages des Seychelles avec le trépied dans le sable au couché du soleil, c’est un stress (positif) constant ! La vague arrive, le temps de pose est long mais pas trop, et à chaque fois la vague ramollit le sable, le trépied s’enfonce dans le sable, ça bouge tout, la photo est floue et il faut recommencer le cadrage. Marrant mais complexe finalement !
Et puis les poses longues à la tombée de la nuit, c’est toujours un peu « magique », surtout qu’avec le réducteur de bruit, l’image prend le même temps que la pose avant d’apparaitre sur l’écran, donc, en général, c’est au petit matin dans la tente que je découvre ce que les poses ont révélé.
J’ai commencé la photo assez tardivement, environ en même temps que l’arrivée massive du numérique. Je n’ai pas connu l’argentique.
J’ai commencé avec des compacts et bridges numériques assez étranges, si je les reprenais en main aujourd’hui ce serait difficile. Mais comme je ne m’en rendais pas compte, j’étais tout content avec ça et tout allait bien.
Aujourd’hui, j’utilise un Canon 5D Mark II, avec comme lentilles le 17-40 F4 L, 85 F1.8, 70-200 F4 L IS et Sigma 105 macro. Une dizaine de filtres LEE dégradés et polarisant, et un trépied Manfrotto CXPRO4.
Et je me suis, malheureusement ou heureusement, habitué à ce détail et cette profondeur dans l’image. C’est aussi important d’avoir un matériel résistant aux intempéries et aux chocs divers car j’ai tendance à accéder à des endroits un peu louches pour un point de vue particulier et c’est souvent rude pour l’appareil.
J’apprécie aussi la souplesse dans les ISO car je fais aussi des photos de portraits, d’événements… et j’aime restituer l’ambiance sans flash.
L’état de constante inspiration et découverte d’énergies cachées que j’ai vécu en Islande me donne envie, c’est vrai, de suivre une expédition. Et je me sens aujourd’hui capable d’en faire le reportage car j’ai aussi remarqué que j’aimais inclure des personnages dans un décor avec ambiance.
J’ai ce projet mais aussi celui d’étendre cette idée de stage photo à des tours plus grands et peut-être sous forme de voyage photographique justement, du moins, une fois que j’aurai compris comment faire pour organiser ça. Car il faut avouer que la facette professionnelle de ma passion n’est pas du tout mon fort. Je n’y comprends pas grand-chose et j’aurais probablement besoin d’aide à vrai dire. Mais bon, petit à petit, tout devrait prendre son sens ! Merci !
Les raisons qui l’ont amené à commencer la photographie, en 2003, sont toujours abstraites… C’est apparu d’une façon naturelle, « sans faire exprès ». Il semble que l'artiste souhaitait exprimer une certaine forme de beauté, en expérimentant et en apprenant, seul, à sa façon, sans aucun but ni ambition quelconques. Une sorte d’amusement égoïste, solitaire. Un « appel intérieur » qu’il fallait bien suivre. La même sensation que lorsque qu'il prit une guitare quelques années auparavant, pour petit à petit passer 6h par jour à jouer.
En 2008, Alexandre Deschaumes passe semi-professionnel, donne des cours (stages photo et workshops), expose ses images et fait des sessions de portraits pour des gens ou événements. Le photographe a désormais tendance à se porter au plus vers la nature, et plus particulièrement les atmosphères à tendance mélancolique, romantique et sauvage. Une tristesse qui n’est belle que lorsqu’elle est teintée d’espérance…
Pour contacter Alexandre Deschaumes :