En somme plus flatteuse…
Ne te formalises pas tu n'es pas le seul à publler de bonne foi des photos de gosses Je veux juste ramener un peu de retenue et de savoir vivre dans notre pratique qui peut vite tomber dans une forme d'obscénité morale et il ne suffit pas de ramener des photos de gamins de contrées exotiques pour se considérer comme exempt de ce tabou que notre société a fort judicieusement mis sur la diffusion d'images d'enfants.
Cette facilité que nous offre notre art ne nous dispense pas de savoir respecter ceux que nous photographions car photographier n'est pas publier et une image appartient autant a celui qui la fait qu'a ceux sui sont dedans.
- Voici l'état des lieux en matière de droit.
Toute personne, anonyme ou célébrité, dispose d'un droit sur son image. Et ce droit est le même pour tous. A l'heure des réseaux sociaux, sur lesquels les images transitent très aisément, il n'est pas inutile de rappeler les contours de ce droit prétorien.
Le droit à l'image peut se définir comme le droit dont dispose toute personne d'autoriser, ou non, la diffusion publique de son image reconnaissable. C'est la mise à disposition du public, sans autorisation expresse et écrite de l'intéressé, qui constitue l'infraction à partir du moment où la personne est identifiable. Ce droit concerne toutes les techniques (Voir Emmanuel Pierrat, Reproduction interdite ? , Maxima, 2002, pp. 32 à 34) : non pas uniquement les images filmées ou photographiées auxquelles on pense communément lorsque l'on évoque le droit à l'image, mais aussi les dessins (à l'exception de la caricature, qui est libre à condition que le but recherché soit humoristique), gravures, sculptures, images de synthèse…etc. Ce droit concerne également tous les supports (Voir Emmanuel Pierrat, Reproduction interdite ? , Maxima, 2002, pp. 34 à 37) : la presse, la télévision, internet, les livres, les cartes postales, les sacs, les t-shirts…etc.
La personne représentée doit être informée de l'utilisation publique qui va être faite de son image, et elle et elle seule est en mesure de consentir ou non à cette publication (à l'exception des mineurs, pour lesquels on sollicite l'autorisation de la ou des personnes investies de l'autorité parentale). Il est par conséquent interdit de publier sans son accord, sur un réseau social par exemple, la photo reconnaissable d'une personne, a fortiori de la "tagger" ce qui la rend encore plus identifiable puisque la personne est alors nommée. Car le consentement à la publication de la personne objet de l'image ne peut jamais être présumé : on ne peut rien déduire du fait qu'une personne sourit au photographe ou encore consent oralement à se laisser filmer. Le droit à l'image est un droit personnel, ainsi par exemple, l'employeur ne dispose pas du droit de disposer de l'image de son salarié, sauf à s'être assuré par écrit de son accord (il peut s'agir d'une clause du contrat de travail).
Il convient également d'être prudent s'agissant des commentaires qui accompagnent l'image. Car une violation du droit dont chacun dispose sur son image peut alors se mêler à une atteinte à l'intimité de la vie privée, droit garanti par l'article 9 du Code civil, si les commentaires concernent la vie sentimentale, familiale, l'état de santé, …etc. Seule entorse à ce principe, la célébrité qui se trouve dans un lieu public dans le cadre de son activité publique (Voir Cass. Civ. 1ère, 16 mai 2012, Hachette Filipacchi c/ Patrick X… : "(…) la liberté de communication et d'information autorise la publication de photographies de personnes impliquées dans un évènement public, particulièrement lorsqu'il s'agit de personnes publiques s'étant exposées sciemment aux objectifs des photographes, dès lors que cette diffusion est en relation directe avec l'évènement et ne constitue pas une dénaturation de l'image de ceux qui y sont représentés (…)."), à condition que l'image ne soit pas dénaturée ou accompagnée de commentaires diffamatoires et injurieux. Il convient d'ailleurs de préciser que dans un tel cas, il existe deux infractions (atteinte au droit à l'image et violation du droit au respect de la vie privée par exemple) qui sont distinctes et qui justifient donc un droit à réparation distinct.
Ainsi, lorsqu'une personne, physique ou morale, souhaite publier l'image reconnaissable de quelqu'un et qu'elle ne dispose pas de son accord écrit, elle doit soit renoncer à la publication, soit utiliser les techniques dites de "floutage" ou de "blurage" visant à rendre flous les traits du sujet de l'image.
Seules les exceptions concernant les images d'actualité ou les images historiques dispensent de telles précautions. En effet, lorsque l'image véhicule une information d'actualité ou en rapport avec des évènements historiques, c'est le principe du droit du public à l'information, basé sur la liberté de communication et d'information, qui trouve à s'appliquer et qui supplante les droits de la personnalité auxquels il pourrait se heurter, à commencer par le droit à l'image. On considère qu'une image véhicule une information d'actualité lorsqu'elle illustre un évènement relativement proche dans le temps, par exemple une manifestation publique qui s'est déroulée la veille, voire la semaine ou le mois précédents l'acte de publication. Prenons l'exemple de certaines photos célèbres illustrant les évènements de mai 1968, publiées dans les jours qui ont suivi les faits, elles ne donnaient pas prise à l'application du droit à l'image. Et aujourd'hui, leurs régulières rééditions ne permettent pas non plus aux personnes identifiables sur ces images d'invoquer la violation à leur droit à l'image, car ces images ont désormais une dimension historique. Seule limite à l'application du principe du droit du public à l'information, le respect de la dignité humaine. Une image historique ou d'actualité qui attenterait à la dignité de la personne sujet de l'image ne peut être publiée sans l'accord expresse de cette dernière, sauf à "flouter" son visage pour préserver son anonymat.
Le monde du droit
Séverine Dupuy-Busson, Avocat à la Cour.